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Il faut défendre l’Elysée

  • Photo du rédacteur: Olivier Bétourné
    Olivier Bétourné
  • 7 janv.
  • 3 min de lecture

           On voudrait trouver les mots,  les mots justes,  ceux  qui  désarment la haine, percent le brouhaha, dynamitent les petites  ambitions. Les mots qui s’y entendent à tromper  la vigilance des aboyeurs du  « bon droit » et de la « juste cause » pour  parvenir à glisser au moment opportun : Regardez, là,  une pause s’il vous plaît, juste une pause, c’est le pays tout entier qui glisse, ce sont les lumières qui s’éteignent une à une. Ce n’est tout de même pas cela que vous voulez ?

          Le pays s’enlise dans la dépendance  et vous persistez à refuser  le moindre sacrifice ? A exiger l’indexation intégrale de vos retraites, le remboursement intégral de vos médicaments, au risque de mettre en faillite  un système unique au monde?  A vous opposer à tout effort fiscal ? A gérer votre petite boutique de bon citoyen issu de la bonne classe moyenne en vous insurgeant tantôt contre l’Etat qui prélève, tantôt contre l’Etat qui ne dispense pas les aides comme il devrait ? 

       Mais au fait : ce n’est pas la première fois que le pays est au bord de la faillite. Le grand précédent, c’est 1789, non ? Et ne devons-nous pas à nos glorieux   prédécesseurs cette idée que seule la réunion de la nation  autour de ses représentants est susceptible de conjurer la menace ? Cette abolition des privilèges, cette proclamation de l’égalité fiscale,  ça avait de la gueule tout de même ? Or, rien ne s’oppose à ce que nous prenions modèle sur les Constituants de 1789, rien ne nous interdit de traiter tous ensemble  le problème plutôt que d’en abandonner la responsabilité aux grands maîtres de la défense catégorielle et aux illusionnistes de la  politique-miracle, gauche et droite confondus : prête-t-on  plus d’attention à l’intérêt général d’un côté que de l’autre ? 

        A l’évidence, non. Et aux yeux de l’électeur de gauche que je suis, le spectacle qu’offre mon camp est insupportable. Tout pour sauver son siège,  le courage on verra plus tard. Un jour dans une direction, le suivant à rebours. Petites ambitions assumées au nom de petits intérêts. 

       La fameuse tripartition du pays appelait pourtant autre chose. Rassemblement national, Bloc central, Nouveau front populaire. Trois blocs, trois attentes de l’électorat, pas de majorité absolue. On pouvait discuter des priorités de chacun, mais enfin, ces priorités, il était possible d’en arrêter les termes, loin des fameuses « lignes rouges » et des menaces de censure. Quelques mois à passer ensemble avant la prochaine présidentielle, était-ce  le bout du monde ?  

       On pouvait, par exemple,  imaginer un triptyque du genre :  renforcement du volet sécuritaire ; réaffirmation de la priorité européenne et environnementale ;  mise en œuvre des réformes sociales d’urgence . 

      Non, ce n’était pas le bout du monde de s’engager ensemble à résoudre les problèmes  qui frappent brutalement  la nation. Quoiqu’en dise la gauche, l’insécurité au quotidien rend la vie insupportable à ceux qui la subissent ; quoiqu’en pense le centre et  la droite, cette réforme des retraites imposée au 49-3 contre l’avis de 80% des Français ne sera jamais considérée comme légitime par le peuple de France (aussi nécessaire soit-elle), pas plus que l’écart insupportable des revenus entre les plus riches et les plus pauvres.  Et  non, mesdames et messieurs les politiques de tous bords, cette façon que vous avez de détourner le regard quand il est question  des millions de personnes  qui vivent en dessous du seuil de pauvreté  est indigne de la République quand la priorité devrait être, au contraire, de corriger sans délais les raisons pour lesquelles ils passent à travers les mailles de l’ Etat-providence. Mais les exclus votent peu, n’est-ce pas ? 

       Bien sûr, et j’en ai bien conscience, notre pays est plus à l’aise dans la rupture que dans le compromis. Le clivage gauche-droite est profondément ancré dans notre culture politique : il remonte à plus de deux siècles, plus exactement à ce jour de septembre 1789 où la  question du veto royal  fut mis aux voix à la Constituante : ceux qui y étaient favorables se portèrent  à la droite du président, ceux qui y étaient hostiles se massèrent  à sa gauche.  Et la part de nous-mêmes  qui s’est portée  ce jour-là d’un côté ou de l’autre du bureau présidentiel  n’est certainement pas disposée à se fondre dans une fade réplique du parlementarisme à l’anglaise. Pas notre style.

      Mais une trêve au nom de l’intérêt général? Une cessation provisoire des joutes oratoires qui fixerait la reprise des hostilités à la prochaine présidentielle pour ne pas désespérer les chauffeurs d’estrade, c’est envisageable, non ?

      Du bruit pour pas grand-chose, diront les pêcheurs en eau trouble. Pourtant,  s’efforcer de réunir les trois tiers des électeurs autour d’un programme d’urgence mis en œuvre par les partis de l’arc républicain -quoi que nous pensions du président en place-,  n’est-ce pas la seule chose à faire si nous voulons éviter que le Rassemblement national  s’installe à l’Elysée d’ici quelques mois ? 

      

          



2 Kommentare


dhbwalter
07. Jan.

Article qui a le mérite de nous inciter à la réflexion, quelle que soit notre appartenance, indépendamment de celle-ci. La France est au bord du gouffre, le chaos nous empêche de penser. Pourquoi ne pas prendre un peu de recul, jusqu'aux présidentielles, juste pour penser ?

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Alain Bischoff
Alain Bischoff
07. Jan.

Article qui se veut consensuel et rassembleur mais qui, dans sa dernière phrase, se contredit en avouant que le but recherché, c'est d'écarter le RN du pouvoir en le plaçant a priori hors du prétendu « arc républicain », tout en ignorant ses 11 millions d'électeurs. La trouvaille de dernière minute  dite « arc républicain », c'est-à-dire — dictée par l'intérêt de sauver des sièges et des prébendes — la collusion contre nature d'une gauche qui depuis longtemps a perdu ses valeurs et ses principes et de partis de droite — des LR au Marais macroniste — vaincus des dernières élections et réduits à la portion congrue, ne peut-être un exemple à suivre dans une démocratie digne de ce nom.


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